Tensions

le .

« … Si l’environnement local des agriculteurs rassemble de plus en plus une majorité d’acteurs non agricoles, il s’y déploie également des réalités agricoles différentes. En effet, lorsque les agriculteurs ont encore un voisin agriculteur, ce dernier ne partage pas forcément la même vision du métier ni les mêmes logiques sur les plans technique, stratégique, ou patrimonial. Ainsi, à côté des formes d'agriculture traditionnelles, construites autour de la figure du chef d'exploitation et mobilisant une main-d’œuvre principalement familiale, se développent des formes entrepreneuriales diverses, pour certaines extrêmement financiarisées et abstraites où le personnel est majoritairement salarié. À côté d’une agriculture familiale de plus en plus sociétaire, se développent de nouvelles pratiques et formes d'organisations reposant sur des dispositifs de prestations intégrales du travail agricole (du labour à la récolte) et des tâches qui y sont associées (comptabilité, informatique, gestion patrimoniale...). La délégation « intégrale» de l'exploitation agricole dans toutes ses composantes offre les contours d'une nouvelle division du travail entre ce que l'on pourrait appeler des firmes de sous-traitance et un « dit exploitant » qui ne souhaite plus assurer la gestion d’un patrimoine familial souvent « en sursis ». Elle témoigne d'une inversion totale du rapport « travail et gestion salariale vs travail et gestion familiale ». Les nouvelles réalités de l’entreprise agricole qui ne s'incarnent plus forcément dans celles de l'exploitation agricole familiale sont aussi des réponses à de nouvelles contraintes technologiques et territoriales, et tendent à se développer notamment en périphérie des grandes agglomérations urbaines de l’Europe occidentale... »

François Purseigle